DIDIER, QU’EST-CE QU’A BIEN PU TE FAIRE MAÎTRE GIMS ?

Une nouvelle fois, Joey Starr s’en est pris à l’idole d’une partie de notre jeunesse. Peut être qu’il est un peu agaçant d’entendre les refrains du bien nommé Gandhi – son vrai prénom – susurrés sur toutes les lèvres de nos petits frères et sœurs, mais au fond, Gims, ne demande finalement qu’à grailler sa part du gâteau en paix, comme Joey, en fait.

 

La prise de parole de Joey Starr lors de son passage au grand journal du 19 octobre dernier n’est pas passée inaperçue puisque très relayée dans les médias dits spécialistes et autres. Pendant son passage, Didier, que nous connaissons pour son gout du verbe et du – pas toujours – bon mot, accable doucement Maitre Gims, le rappeur/ icône membre de la Sexion d’Assaut. Puisque ce n’est pas la première fois que le Jaguar se fait la peau de Mugiwarano, et, puisque cette rubrique s’intitule « expression urbaine » pourquoi ne pas donner notre avis, nous aussi, sur cette – petite – histoire qui en cache certainement une autre un peu plus grande. L’avantage quand on n’est pas assis en face de Maïtena, c’est qu’on peut prendre le temps de raconter d’autres histoires. Bon, le désavantage quand on publie sur cette plateforme, c’est que personne ne nous lit.

 

« On était vachement plus large, puis moi j’arrive du funk, de la soul, les premiers festoches qu’on a fait, c’était des trucs punk rock, y’avait pas de scène rap (…) »

 

« Je dois énormément à la musique, et je me dois d’être au garde à vous », C’est en ces termes, prononcés lors d’un entretien réalisé par Mouloud Achour le 9 juillet dernier, que Joey Re-Sta nous expliquait le rôle majeur qu’aura occupé la musique tout au long de sa vie. Nous le comprenons et n’en doutons pas. À une époque où construire une carrière rap dans le paysage culturel français relevait du véritable parcours du combattant, sans doute que son avis est à prendre en compte et son expertise en la matière n’est plus à prouver puisque acteur privilégié de l’émergence du hip hop dans les scènes de musiques actuelles. Cependant, nous sommes en droit de nous demander si cette expertise autorise toutes les saillies. À ceci nous nous répondrons non. Dernière en date, lors de sa venue sur le plateau du grand journal de canal plus, le rappeur/acteur s’est fendu de plusieurs attaques sur lesquelles il convient de revenir. Non pas que nous soyons de grands admirateurs de la musique de Maitre Gims –loin de là–, non plus que nous pensions que ce dernier mérite d’être défendu.

 

Joey malpoli

 

Nous pensons néanmoins que ce parcours, pour le moins honorable, qu’on ne cesse de lui rappeler lors d’interviews, n’autorise pas pour autant la condescendance. D’ailleurs, nul besoin de rappeler à Joey Star qui il est, puisqu’il s’en souvient très bien. Ne serait-ce qu’au grand journal entre les « on était vachement plus large, puis moi j’arrive du funk, de la soul, les premiers festoches qu’on a fait, c’était des trucs punk rock, y’avait pas de scène rap (…) » et les « on a aussi dit de nous qu’on était le groupe le plus rock du rap » (une médaille, peut-être ?). Pas de panique donc, la mémoire de Didier se porte très bien.

 

Papa Wemba, Fogerty et Jessye Norman

 

Durant son intervention, le métèque déclare ne pas donner d’importance aux parcours lorsque Maïtena compare, maladroitement, les carrières des deux rappeurs. En pointant du doigt la diversité des influences musicales dont il est issu, Joey Starr en filigrane, pointe surtout du doigt – c’est comme ça que nous l’entendons – le prétendu manque de culture musicale de Maitre Gims. Lorsque l’on connait l’environnement musical dans lequel a grandi le rappeur parisien – fils d’un musicien du groupe de Papa Wemba – nous pouvons émettre quelques doutes, mais quand bien même, bon nombre d’MC ne connaissent peut être pas l’existence de Fogerty ou de Jessye Norman et ne sont pas pour autant de mauvais rappeurs.

 

Maitre Gims

 

Qu’est ce qui dérange donc l’ancien membre de NTM dans la musique de Maitre Gims ? Le fait de faire de la mauvaise musique? Peut être, et il est loin d’être le seul. De la mauvaise musique ça existe, comme les mauvais films. D’ailleurs à ce propos nous vous déconseillons « les seigneurs » et « les gorilles ». Pourtant, loin de nous l’envie de dire que Didier Morville fait des films de merde. Déclarer ne pas accorder d’importance aux parcours des artistes, et rappeler à qui veut bien l’entendre, le sien, nous y voyons une contradiction gênante. Gims domine la tête des ventes, c’est un fait. Et quoi qu’en dise Re-Sta, le chemin parcouru, ça compte. Et lorsque l’on regarde celui de Gims et ses acolytes de la Sexion, des premiers freestyles filmés – ou la mauvaise qualité des vidéos ne masquait pas l’absence de crème sur les mains rudes de Jr et Doomam’s – en passant par les démêlés avec la justice pour propos homophobes, puis l’annulation des tournées, pour enfin arriver à la consécration de Gims et Black M, ce parcours mérite d’être souligné. On n’est pas obligé d’aimer, d’ailleurs on n’aime plus. Mais on l’avoue, on « kiffe voir la misère s’élever ».

 

 

Si on s’interroge maintenant sur les raisons des attaques du rappeur/rockeur à l’encontre de Gims, ou comme il l’avait fait envers Booba, une question nous vient : Ces attaques sont-elles le fruit de la lassitude d’un mentor, blasé de voir le mouvement dont il est issu adopter des directions artistiques douteuses ? On le croit volontiers. En même temps, avec l’expérience qu’il fait valoir, n’y a t-il pas une forme de naïveté (et de facilité) à s’insurger publiquement, étant donné le rap de grande distribution auquel s’adonne Gandhi depuis quelques temps maintenant? Nous pensons plutôt que, comme toute ancienne gloire qui se respecte, Joey est atteint d’une maladie grave ; celle qui consiste à avoir la phobie de la disparition du paysage médiatique. L’acteur, excellent dans Polisse (on ne le rappellera pas assez), déclare sur la chaîne cryptée attendre plus de la star du rap actuel, du fait de sa position de chef de file. Malgré toute la sympathie que nous avons pour Maitre Gims, le qualifier pour autant de chef de file, est un poil exagéré. À moins que le nombre de vente de CD fasse de vous le chef de file d’un mouvement. Ça se tient, en tout cas, nous ne faisons pas la queue à cette file. En attendant, on me chuchote que nous pourrons voir prochainement Joey Starr sur nos écrans, dans le rôle du dénicheur de grand talent pour D8, à La Nouvelle Star. Attention tout de même pour eux à ne pas être les nouvelles stars du rap, ils pourraient se faire des ennemis.

 

Arsbassi